
« À cause de cette affairement intérieur qui se poursuit presque tout le temps, nous risquons de passer à côté d’une grande part de la texture de l’expérience de notre vie, ou de réduire sa valeur et son sens.
Disons par exemple que nous sommes plutôt détendus et apprécions le spectacle du soleil couchant. Nous sommes frappés par les jeux de lumière et les couleurs des nuages et du ciel. À ce moment, nous sommes simplement présents à ce spectacle nous en sommes remplis, nous le voyons vraiment. Puis des pensées viennent et nous nous trouvons peut être en train de dire quelque chose à un ami, au sujet du coucher de soleil et de son extraordinaire beauté, ou d’un souvenir qu’il nous rappelle. En parlant, nous troublons l’expérience directe de cet instant. Nous avons été distraits du soleil du ciel et de la lumière. Nous avons été capturés par notre propre pensée et notre impulsion de lui donner une voix. Notre commentaire brise le silence. Ou, même si nous ne disons rien, la pensée ou le souvenir qui a émergé nous a déjà détournés du vrai coucher de soleil de ce moment.
Ainsi, nous savourons maintenant vraiment le coucher de soleil dans notre tête plutôt que le coucher de soleil qui se passe dans la réalité. Peut-être sommes-nous en train de penser que nous goûtons le coucher de soleil mais, en réalité, notre expérience en est voilée. Nous le voyons au travers du voile des embellissements apportés par l’image d’un ancien coucher de soleil, de souvenirs associés et d’autres idées qu’il a déclenchés en nous. Tout ceci peut se passer sans que nous en ayons la moindre conscience… »
Jon Kabat-Zinn, Au cœur de la tourmente, la pleine conscience.